Anthropic débourse 1,5 milliard pour clore un litige de droits d'auteur

Anthropic règle à l'amiable pour 1,5 milliard de dollars un litige sur l'usage de livres piratés pour entraîner ses IA.

Anthropic débourse 1,5 milliard pour clore un litige de droits d'auteur

Anthropic vient de conclure un accord à l'amiable de 1,5 milliard de dollars pour mettre fin aux poursuites intentées par des auteurs et éditeurs. L'entreprise était accusée d'avoir utilisé des millions de livres piratés pour entraîner ses modèles d'intelligence artificielle, notamment Claude. Cette transaction marque un tournant dans la gestion des litiges de propriété intellectuelle dans le secteur de l'IA.

Aux origines du conflit

Le procès avait été initié le 19 août 2024 par un collectif d'auteurs mené par Andrea Bartz, Charles Graeber et Kirk Wallace Johnson. Leur accusation portait sur l'utilisation non autorisée de contenus provenant de plateformes de piratage comme Library Genesis et Pirate Library Mirror. Ces bases de données illégales auraient servi à constituer les corpus d'entraînement des modèles linguistiques d'Anthropic.

La controverse illustre une problématique centrale du développement de l'IA : l'accès aux données d'entraînement. Pour atteindre leurs performances actuelles, les modèles de langage nécessitent des volumes considérables de textes variés, poussant certaines entreprises vers des sources juridiquement douteuses.

Un règlement complexe aux implications majeures

L'accord prévoit une indemnisation de 3 000 dollars par œuvre concernée, pour un total estimé à 500 000 ouvrages. Au-delà du montant financier, Anthropic s'engage à détruire définitivement les données issues de sources pirates. Cette clause revêt une importance particulière car elle impose une restructuration complète des bases d'entraînement de l'entreprise.

Le règlement ne couvre cependant que les violations antérieures à août 2025, laissant Anthropic exposée à de futures poursuites si de nouvelles infractions étaient constatées. Cette limitation temporelle reflète la volonté des plaignants de maintenir une surveillance continue sur les pratiques de l'entreprise.

La distribution des fonds suivra un processus uniforme, avec des démarches simplifiées pour les ayants droit. Cette approche pragmatique contraste avec les procédures habituellement longues et complexes des class actions.

Entre fair use et responsabilité juridique

Le dossier avait connu un épisode judiciaire remarqué en juin dernier. Le juge fédéral William Alsup avait alors estimé que l'utilisation d'œuvres protégées pour l'entraînement d'IA relevait du "fair use" (usage équitable) selon le droit américain. Cette décision semblait initialement favorable à Anthropic et aux autres acteurs technologiques.

Cependant, le magistrat avait maintenu les accusations concernant le stockage de plus de 7 millions de livres piratés dans une "bibliothèque centrale". Cette distinction technique s'avère cruciale : si l'entraînement peut bénéficier d'exceptions légales, la constitution et la conservation de collections pirates restent condamnables.

L'accord intervient avant le procès prévu en décembre, évitant à Anthropic une exposition médiatique prolongée et des dommages potentiellement plus importants. Cette stratégie défensive témoigne de la fragilité juridique des entreprises d'IA face aux questions de propriété intellectuelle.

Un précédent aux ramifications sectorielles

Cette transaction pourrait établir une référence pour d'autres litiges similaires dans l'industrie. OpenAI, Google et Meta font face à des accusations comparables, et le montant accordé par Anthropic risque d'influencer leurs propres négociations. L'enjeu dépasse le simple cadre financier : il s'agit de définir les règles d'usage des contenus protégés dans le développement de l'IA.

Les entreprises du secteur devront désormais intégrer ces coûts de conformité dans leurs stratégies de développement. L'accès légal aux données d'entraînement devient un avantage concurrentiel déterminant, favorisant potentiellement les acteurs disposant de partenariats éditoriaux solides.

Cette affaire souligne également l'importance d'une approche proactive en matière de propriété intellectuelle. Les entreprises d'IA ne peuvent plus se contenter d'invoquer le fair use ; elles doivent désormais documenter précisément leurs sources et respecter les droits des créateurs.

Le règlement d'Anthropic marque une étape significative dans la maturation juridique du secteur de l'intelligence artificielle. Il établit un coût tangible à l'utilisation non autorisée de contenus protégés et force l'industrie à repenser ses pratiques de collecte de données.